08/12/2011
Sénégal

Soupçon de gré à gré : l'État se mouille avec la SDE

Voulant passer du contrat d'affermage à celui de concession, l'État a
signé avec la SDE un protocole d'accord ayant pour objet concéder à
l’opérateur la production de l'eau potable ainsi que la gestion des eaux
pluviales et des eaux usées. La société des eaux transmettra son étude
de faisabilité à la fin du mois.Aux yeux de certains la procédure sonne
comme un gré à gré ; ils auraient souhaité que le contrat de délégation
de service soit attribué par appel d'offres.

Le contrat d'affermage, qui le lie à la Sénégalaise des Eaux – SDE,
prenant fin en 2012, l'État du Sénégal s'est engagé à aller vers la mise
en place d'une convention de concession avec une société privée afin
d'assurer une gestion quantitative et qualitative de l'eau. Pour ce
faire, il a signé avec la SDE un protocole d'accord qui a pour objet de
concéder à cette dernière les services de l’eau et l’assainissement. Le
choix de la procédure est vivement critiqué par certains, dont Birahim
Seck, qui s’est exprimé lors d’un débat organisé par l'Institut
panafricain de citoyenneté-consommateurs et de développement en Afrique –
CICODEV-Afrique. Ainsi, pense-t-il, le protocole d'accord que l'État a
conclu avec la SDE fausse le principe d'appel d'offres qui doit régir
les contrats de délégation de service public. "Le code des marchés
publics est clair : pour passer un contrat de délégation de service
public, il faut d'abord un rapport d'opportunité qui sera envoyé à la
direction centrale des marchés publics, un rapport de performance et un
appel d'offres en deux étapes ou par pré-qualification"
, explique
Seck, qui estime néanmoins qu'il y a possibilité de passer un marché
public par entente directe pour les contrats de concession. Mais,
précise-t-il, "il faut qu'il y ait une urgence ou bien une seule
source capable de satisfaire ce besoin de l'État. Ce qui n'est pas le
cas ici."
Selon lui, la SDE ne peut en même temps prétendre réaliser
l'étude de faisabilité et se positionner comme futur concessionnaire.
L’interlocuteur, chargé de communication du Forum civil et ex-assistant
vacataire en droit public à l’université de Dakar  estime aussi que "le
fait de vouloir concéder l'eau et l'assainissement, avec la gestion des
eaux pluviales et les eaux usées, en un seul contrat n'est pas
rentable. L'État va donner l'assainissement, qui n'est pas rentable, à
un privé sur la base d'un cahier des charges qu'il n'a pas établi."

Mais, pour le directeur général de la SDE, il n'a jamais été question de gré à gré. "On
nous a confié une étude de faisabilité et nous rendrons les conclusions
à l'État du Sénégal qui est seul souverain et qui prendra les décisions
qui s'imposent"
, souligne Mamadou Dia, présent au débat en précisant :
"La concession se fera en sauvegardant les acquis. L'État a clairement
indiqué que les tarifs doivent être socialement acceptables. Ce qui veut
dire que les populations défavorisées seront dans les mêmes conditions
qu'actuellement. Il y aura les branchements sociaux, les extensions et
une tarification sociale, il ne faut pas s'inquiéter. Les schémas sont
faits pour progresser et pour s'adapter aux conditions locales afin
d'améliorer les conditions de desserte en eau des populations."

Dans le protocole, il est écrit que la SDE va se charger de présenter à
l'État une étude de faisabilité et de préparer un cahier des charges
incluant le plan d'affaire, les tarifs et un projet de contrat avant le
30 novembre 2011.

Seyni Diop, Walfadjri (Dakar) – AllAfrica 19-11-2011